Réinventer la vente en magasin
1 - Constat
Baisse du retour sur investissement du secteur
- Une trop forte intensité concurrentielle et la baisse du pouvoir d'achat ont provoqué une course à la baisse des prix.
- La multiplication des ouvertures de magasins et la concurrence du e-commerce provoquent une baisse de la fréquentation en magasin.
- Les enseignes sont contraintes d'investir dans le numérique pour conserver leurs clients, mais la rentabilité du e-commerce reste faible (pression à la baisse des prix, coût élevé des livraisons individuelles, trop de retours)
- Les loyers augmentent alors que le chiffre d'affaires au m2 baisse.
- Les clients se sont habitués à toujours plus de services
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La vacance commerciale s'étend à la périphérie
Avant la crise de 2008, la désertification commerciale ne concernait que les centre-ville historiques.
La crise financière de 2008, puis la crise des dettes souveraines de la zone € ont provoqué une baisse durable du pouvoir d'achat, alors que les surfaces commerciales et le e-commerce ont continué de croître à un rythme rapide. La baisse du chiffre d'affaires au m2 touche l'ensemble de l'appareil commercial et les commerces de périphérie connaissent à leur tour une hausse de la vacance commerciale.
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Une gestion comptable des magasins qui a oublié le client
fr.fasionnetwork.com - 23 Octobre 2017
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2 - Les causes de la crise du commerce en magasin
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Les causes qui touchent l'ensemble de l'appareil commercial
- La baisse du pouvoir d'achat
- Concurrence d'internet
- Les surfaces commerciales augmentent plus vite que la demande
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Les causes spécifiques aux centre-villes historiques
- Difficultés d'accès en voiture : La clientèle familiale des hypermarchés ne peut pas transporter les courses alimentaires de la semaine dans les transports en commun. La clientèle des magasins d'équipement de la maison ne peut pas emporter des meubles sans véhicule. La clientèle des magasins haut de gamme et des boutiques de luxe se déplace le plus souvent en voiture ou en taxi.
- Les règles d’urbanisme, en imposant de ne pas toucher aux surfaces des cellules en rez-de-chaussée, interdisent aux enseignes locomotives de s'implanter en centre-ville.
- L'absence de stratégie commerciale fait que les principales rues commerçantes de centre ville ne répondent qu'à une logique de spéculation immobilière. L'offre commerciale se réduit aux grandes enseignes du textile et de la parfumerie. Les autres secteurs d'activité n'ont pas les marges suffisantes pour payer le niveau très élevés des loyers et du prix de l'immobilier. Après le libraire historique, c'est le cinéma historique du centre ville qui ferme, ce qui fragilise les cafés et restaurants de centre-ville. Sur les Champs-Elysées, après les cinémas, le Virgin Megastore, ce sont les showroom de Mercedes, Toyota et Citroën qui ont fermé au dernier trimestre 2017. Les centres commerciaux performants sont ceux qui ont une offre diversifiée, avec des enseignes sur tous les secteurs d'activité, des restaurants, des cafés, un multiplexe.
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Les causes spécifiques aux villes moyennes
Le déclin des villes moyennes s'explique par la désindustrialisation et la fermeture d'établissements publics (casernes militaires, hôpitaux publics .....).
Le déclin démographique et la paupérisation provoquent un déclin du commerce dans son ensemble.
Déjà fragilisé comme dans toutes les autres villes, le commerce de centre ville atteint le point de rupture dans les villes moyennes, où la vacance commerciale se propage progressivement sur toutes les rues commerçantes secondaires. Dans les petites villes, c'est la rue principale qui voit fermer ses commerces les uns après les autres.
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3 - Les solutions pour réinventer la vente en magasin
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Rétablir une concurrence équitable entre la vente sur internet et la vente en magasin
fr.fashionnetwork.com - 9 Novembre 2017 William Koeberle : Si on veut du commerce physique, en centre-ville ou en périphérie, il faut créer les conditions pour une concurrence équitable. Aujourd’hui, vous avez un commerce numérique qui ne paie quasiment aucune charge locative et foncière. Et je ne parle pas là que des Gafa (Google, Apple, Facebook et Amazon), qui ont profité des règles fiscales pour optimiser leur niveau d'imposition et dont il est bon que le gouvernement commence à s’occuper. L’assiette fiscale basée sur les surfaces de vente n’est plus en ligne avec le monde économique actuel. |
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Revaloriser le rôle du vendeur
Le rôle du vendeur ne peut plus se limiter à la vente de "produits", mais devenir un véritable "personal shopper" (conseils personnalisés) et gérer sa communauté de clients sur les réseaux sociaux (communauty manager).
La vente en magasin doit désormais faire appel à du personnel très qualifié
- Formé aux techniques de vente pour que le client vive une véritable expérience d'achat en magasin et désire acheter.
- Formé aux bases du stylisme de mode pour apporter des conseils personnalisés, voire un service de rellooking pour les plus expérimentés.
- Formé aux réseaux sociaux pour fédérer leurs meilleurs clients
Dans le haut de gamme et le luxe, la vente personnalisée peut aller jusqu'à la prise de rendez-vous avec les meilleurs clients et l'organisation de présentation des nouvelles collections, à l'exemple des manequins-cabine qui présentent les nouvelles collections des créateurs en show-room pour les principaux clients.
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fr.fasionnetwork.com - 23 Octobre 2017 Désirée Bollier : Nous avons créé des modules de formation spécifiques avec l’École hôtelière de Lausanne, qui marient le retail et l’hôtellerie, et c’est un prérequis pour travailler chez nous. Nous venons de passer les trois mois de formation, avec 380 sessions pour toute l’équipe. Selon moi, les vendeurs ne devraient pas se voir comme des vendeurs, mais plutôt comme des majordomes et des concierges. |
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Enseignements du baromètre Social Retail 2018
Si 76 % des employés de boutiques sont « plutôt heureux » ou « très heureux » dans leur travail, plus de 85 % des équipes ne recommanderaient pas leur entreprise pour sa capacité à générer du bien-être. A l’heure où l’expérience d’achat est citée par tous comme l’un des principaux leviers du commerce, le chiffre est d’autant plus inquiétant qu’il est en progression, selon le baromètre Social Retail RMS 2018.
Ainsi, près de la moitié du panel d'employés du commerce interrogés est à l’affût d’une autre opportunité d’emploi, auxquels s’ajoutent 20 % de salariés en attente d’une promotion.
Les principaux éléments négatifs dans l’expérience des salariés s’avèrent être :
- l’incohérence des procédures (20 %) --> trop de reporting
- le manque de valorisation du métier (16 %)
- le manque de temps pour mener à bien les missions (10 %) --> trop de reporting
- la fatigue physique (10 %).
- un trafic client « inadapté » (9 %)
- le manque d’intérêt de la mission (9 %)
- les horaires décalées (7 %).
Les leviers de bien-être d’un commerce sont :
- l’ambiance au travail (54 % des employés) --> petits déjeuner hors de la boutique une fois par mois.
- la qualité de la relation avec les clients (42 %)
- l’affinité avec la marque (36 %)
- la qualité de la relation avec le manager (31 %)
- l’intérêt pour les mission (27 %)
- le développement du chiffre d’affaires (24 %)
- le niveau et système de rémunération (23 %)
- les perspectives d’évolution (23 %)
- la qualité des conditions de travail (22 %).
Un management qui contribue au bien-être des employés :
- l’autonomie accordée dans l’exécution des missions (24 %)
- l’esprit d’équipe (22 %) --> la génération internet veut travailler en équipe
- la possibilité d’atteindre les objectifs fixés (14 %)
- l’aide au développement des compétences (13 %)
- la reconnaissance du manager (12 %)
- la reconnaissance de l’équipe (8 %)
- l’écoute du manager (4 %)
- l’attribution de missions supplémentaires (3 %).
La relation client qui contribue au bien-être des employés de boutiques.
- Le client exprime sa satisfaction (26 %)
- Le client reconnaît l’expertise du personnel (23 %)
- Le client tisse un lien personnalisé avec le vendeur (17 %)
- La réalisation de belles ventes (12 %)
- L’offre d’un service de qualité (11 %)
- La fidélité des clients (10 %)
« Il y a un désengagement des managers de terrain qui sont souvent dans leur bureau pour faire le reporting. Et ne peuvent pas encadrer et accompagner leur équipe sur le terrain."
"Quand les procédures sont écrites, on pense en général besoins du siège et pas du terrain ". Ceux qui écrivent les procédures doivent être envoyés en magasin pour voir les conséquences sur le terrain.
Pour assouplir ce carcan, certains s'inspirent de l'approche d'Apple, qui fait en sorte de dégager ses équipes de vente des contraintes du reporting et de la pression des objectifs. « J'ai demandé à mes équipes en magasins de stopper certains reportings, explique le dirigeant d'une marque de thé. Plusieurs semaines plus tard, personne n'avait demandé ces informations. C'est qu'elles n'étaient pas stratégiques. Nous nous en passons. En ce qui concerne les objectifs, l'an passé, je n'ai pas fixé d'objectifs de croissance des ventes. Je leur ai dit "faites le n-1". En revanche, j'ai mis en place un bonus exponentiel s'ils dépassaient cette barre. Nous avons versé 10 % de primes de plus. »
L’enquête Social Retail RMS 2018 a été menée auprès de 1 114 employés de boutiques, dont 73 % de femmes, 34 % de moins de 30 ans et 37 % de 31-40 ans. Un panel qui officie à 55 % en boutiques de rue, à 70 % à Paris, a pour 58 % un rôle de management et propose pour 43 % du prêt-à-porter et pour 8 % des cosmétiques.
Conclusion : Un magasin doit être géré comme un business unit en mode start-up, sous le leadership d'un manager charismatique. Pas de reporting, mais de la formation. L'équipe est jugée uniquement sur les résultats. Lorsque les résultats sont mauvais, le magasin passe sous tutelle d'une équipe volante de "réanimateurs".
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Diversification dans de nouveaux services payants
Lorsqu'un magasin est devenu un véritable lieu où se retrouvent les personnes partageant une même culture de mode, il est alors possible de proposer à la clientèle de nouveaux services payants :
- Maquillage
- Coiffure
- Manucure
- Photographie
- Rencontres avec des blogueuses
- Rencontres avec des créateurs à l'occasion de la présentation de leur nouvelle collection
- Cours avec des stylistes en début de chaque saison pour connaître les nouvelles tendances de la mode.
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Rémunérer le magasin pour sa fonction showroom et de point de contact physique avec la clientèle
La grande distribution facture très cher à ses fournisseurs la mise en avant de leurs produits en têtes de gondole ou sur leurs catalogues.
Les magasins les plus qualitatifs, ceux qui ont une réelle expertise commerciale dans le secteur de la mode, une réelle qualité architecturale et ont su fidéliser la clientèle locale, apportent une plus-value aux marques quelle sélectionnent, qui va au-delà de la simple vente d'un produit.
Les marques et les créateurs auraient tout intérêt à mettre en place un écosystème où les boutiques les plus qualitatives seraient rémunérées pour leur fonction de show-room et de point relai pour leurs ventes locales par internet
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Applications mobiles pour accompagner le client en magasin
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Naf Naf s'inspire des services de l'hôtellerie de luxe
« Aujourd’hui, l’expérience client est primordiale, nous nous inscrivons à Lyon dans ce qu’on appelle le "retail immersif", à savoir un lieu sensoriel et réhumanisé », expose Véronique Rodriguez, directrice marketing de Naf Naf, précisant que le concept a été mis au point en interne. La sélection de produits effectuée par la cliente est apportée dans la zone de cabines sur des portants, façon chariot d’hôtel chic. Durant l’essayage, elle dispose d’un bouton qui, lorsqu’il est actionné, éteint les ampoules extérieures de l’architecture de la cabine, signalant qu’elle a besoin d’assistance. La teinte dominante du concept ? Le rose poudré évidemment, accompagné de touches or et vert.
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DFS ouvre la Samaritaine en 2019
https://www.lvmh.fr/les-maisons/distribution-selective/dfs/